
Sous l’égide d’un cabinet de conseil, une quinzaine de professionnels de la finance ont publié récemment un livre blanc intégrant une douzaine de recommandations susceptibles de booster la retraite par capitalisation en France.
Le constat est sans appel : quatre ans après le lancement du plan d’épargne retraite (PER) et en dépit de son succès, la retraite supplémentaire par capitalisation a toujours du mal à décoller en France. Selon les derniers chiffres communiqués par le ministère de l’Économie et des Finances, l’encours (les provisions mathématiques) cumulé des produits individuels (souscrits par les particuliers) et collectifs (souscrits dans le cadre de l’entreprise) de préparation à la retraite a atteint 282 milliards d’euros au 31 mars 2023. Un montant inférieur à l’objectif de 300 milliards d’euros de Bercy pour… 2022.
Ce manque de dynamisme est d’autant plus à déplorer que non seulement l’épargne retraite permet aux Français de se constituer un complément de revenu pour leur après-vie professionnelle, mais elle participe au financement de l’économie tricolore. Les capitaux sur ces placements étant bloqués jusqu’à la retraite, les acteurs qui les gèrent peuvent se permettre d’investir dans des actifs risqués, mais potentiellement plus rémunérateurs, comme les actions, voire le private equity (titres d’entreprises non cotées). Des investissements qui permettent aux sociétés, notamment moyennes, de disposer de moyens financiers pour se développer.
Un crédit d’impôt à la place de la déduction fiscale
D’où la publication le 5 octobre 2023 par Yce Partners, un cabinet de conseil en protection sociale, d’un livre blanc sur la retraite supplémentaire facultative (qui s’ajoute aux retraites de base et complémentaire obligatoires). Élaboré avec l’aide d’une quinzaine de professionnels de la banque, de l’assurance, de l’épargne salariale et de l’épargne retraite, épaulés par Laurent Pietraszewki, ex-secrétaire d’État chargé des retraites de 2019 à 2022, et deux experts de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le document formule 12 propositions pour développer le PER.
Parmi elles, figure en bonne place la transformation de la déduction d’impôt à l’entrée en crédit d’impôt pour les personnes non imposables ou peu imposables. Pour rappel, les versements volontaires effectués sur un PER peuvent être déduits, dans une certaine limite, du revenu imposable. Plus les revenus sont élevés et plus cette déduction fiscale est avantageuse. A contrario, elle présente un faible intérêt si le souscripteur est peu ou pas imposé. Avec un crédit d’impôt, ces derniers pourront recevoir un « chèque » du fisc (à hauteur de leurs versements volontaires), sur le modèle des dons aux associations.
La fusion du PERCOL et du PERO
Autre proposition : la fusion du plan d’épargne retraite collectif (PERCOL), qui a remplacé le plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco), et du plan d’épargne retraite obligatoire (PERO), qui a pris la place de la retraite supplémentaire d’entreprise à cotisations définies (ou « article 83 »), dans un plan d’épargne retraite entreprise unique (PEREU). Le PEREU serait indistinctement alimenté par les primes d’épargne salariale (intéressement, participation, abondement de l’entreprise, jours de repos non pris et monétisés) comme pour le PERCOL et/ou par les cotisations obligatoires (prises en charge totalement ou partiellement par l’employeur) comme pour le PERO. Tout ou partie de l’intéressement ou de la participation serait versé, par défaut, sur le PEREU, sauf en cas de refus du salarié.
Cette fusion du PERCOL et du PERO permettrait un alignement des règles entre les deux compartiments. Par exemple, les versements du salarié pourraient bénéficier d’un abondement de l’entreprise, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui pour le PERO. Les frais de gestion du PEREU pourraient être intégralement pris en charge par l’employeur. Par ailleurs, les délais de transfert des Perco vers le PERCOL et des articles 83 vers les PERO seraient plafonnés, alors que ces opérations prennent généralement beaucoup de temps actuellement.
Un déblocage en cas de dépendance
Le livre blanc milite pour que les gestionnaires des PER (bancassureurs, compagnies d’assurance, mutuelles, institutions de prévoyance, sociétés de gestion) soient contraints de communiquer le rendement brut et le rendement net de frais de leurs plans, afin que les épargnants puissent mieux comparer les offres du marché.
Enfin, les PER pourraient être débloqués avant la retraite en cas de perte d’autonomie. Aujourd’hui, des déblocages anticipés sont possibles pour l’achat ou la construction de la résidence principale (sauf pour le PERO), et en cas d’accident de la vie (décès du conjoint ou du partenaire de Pacs, invalidité, surendettement, fin des allocations chômage, cessation d’activité non salariée à la suite d’une faillite).