Les députés ont adopté une proposition de loi permettant aux Français de savoir s’ils détiennent un contrat de retraite supplémentaire.
En quelques clics, les Français vont pouvoir vérifier s’ils disposent ou non d’un produit d’épargne retraite. Si les particuliers savent a priori s’ils ont souscrit à titre individuel un placement leur permettant de percevoir un revenu de complément une fois qu’ils ont quitté la vie professionnelle, tel n’est pas toujours le cas lorsque le contrat a été ouvert à titre collectif, c’est-à-dire dans le cadre de l’entreprise.
Lorsqu’il démissionne, un salarié n’est pas forcément conscient qu’il s’est ouvert des droits dans un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco), un régime de retraite supplémentaire à cotisations définies (plus connu sous l’appellation d’« article 83 », en référence à l’article du Code général des impôts qui le réglemente) ou un régime de retraite supplémentaire à prestations définies (« article 39 ») dans son ex-entreprise. Pour peu qu’il déménage, le gestionnaire du contrat perd facilement sa trace.
Près de 11 milliards d’euros non réclamés
Le montant des capitaux de produits d’épargne retraite non dénoués aux 62 ans du souscripteur – l’âge légal de départ à la retraite – s’élèverait à 10,6 milliards d’euros, selon un rapport publié le 24 mai 2018 par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le régulateur des banques et des assurances. Certes, tous les actifs ne partent pas à la retraite à l’âge légal. En outre, même s’ils ont liquidé leurs droits à la retraite de base et à la retraite complémentaire obligatoires à 62 ans, rien ne les oblige à dénouer leur retraite supplémentaire facultative. Ils peuvent choisir de continuer à cotiser pour se constituer un capital ou des rentes viagères (servies jusqu’au décès) plus élevés.
Reste que, toujours d’après le rapport de l’ACPR, les capitaux non liquidés atteignent encore 5,4 milliards d’euros à 65 ans et 1,8 milliard d’euros à 70 ans et plus. Il est vraisemblable qu’une majorité de ces sommes n’ont pas été récupérées car les souscripteurs en ignorent tout simplement l’existence, voire… ont décédé. On parle alors de capitaux « en déshérence ». C’est pour réduire ce phénomène que les députés ont adopté, le 22 juin 2020, une proposition de loi (PPL) mettant en place un dispositif afin que les Français sachent s’ils sont bénéficiaires d’un contrat de retraite supplémentaire.
Un service en ligne
Celui-ci s’appuiera sur le groupement d’intérêt public (GIP) Union Retraite, qui rassemble 35 régimes de retraite obligatoire (sur les 42 régimes existants en France). La PPL contraint les gestionnaires des produits d’épargne retraite à communiquer au moins une fois par an, à compter d’une date fixée par décret et au plus tard 18 mois après la promulgation de la loi, l’identité et les données de leurs assurés à Union Retraite. Lorsque l’actif se connectera sur info-retraite.fr, le portail édité par le GIP – qui permet notamment de télécharger son relevé de carrière dans lequel figurent ses trimestres et points de retraite, estimer le montant de sa future pension grâce au simulateur M@rel ou liquider sa retraite en ligne -, il pourra connaître ses éventuels droits à la retraite supplémentaire. Un décret viendra préciser quels produits seront concernés par la PPL.
Outre les contrats collectifs, le texte pourrait ainsi concerner également les contrats individuels, tels que le plan d’épargne retraite populaire (Perp), Préfon-Retraite réservé aux fonctionnaires et ex-agents publics, le contrat de retraite Madelin conçu pour les travailleurs non-salariés (artisans, commerçants, chefs d’entreprise, professions libérales), le complément de retraite mutualiste (Corem) ou encore le nouveau plan d’épargne retraite (PER), commercialisé depuis le 1er octobre.
La PPL prévoit que les gestionnaires – assureurs, mutuelles, institution de prévoyance, teneurs de comptes – des produits d’épargne retraite devront financer une campagne de communication pour promouvoir le futur service proposé par info-retraite.fr. Lorsqu’un salarié partira à la retraite, ils devront également l’informer systématiquement s’il s’est ouvert des droits dans le Perco, l’article 83, et/ou l’article 39 mis en place par son employeur. Pour être définitivement votée, la PPL doit maintenant être examinée au Sénat.
Sources : http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15t0450_texte-adopte-seance, https://acpr.banque-france.fr/sites/default/files/media/2018/05/28/20180524_rapportretraitesupp2018.pdf