Face aux nombreux contrats d’épargne retraite non réclamés, le Comité consultatif des services financiers propose que les droits en matière de retraite supplémentaire soient accessibles sur Internet sur le modèle des droits acquis à la retraite obligatoire.
Et si, à côté du relevé pointant les droits acquis au titre des retraites de base et complémentaires obligatoires, était mis en place un relevé recensant les droit acquis au titre de la retraite supplémentaire facultative ? C’est la solution pour le moins innovante qu’a formulée, dans un avis publié le 21 janvier 2020, le Comité consultatif des services financiers (CCSF) pour lutter contre les contrats individuels et collectifs d’épargne retraite « en déshérence », c’est-à-dire non réclamés aux 62 ans des bénéficiaires, soit l’âge légal de départ à la retraite.
Selon un rapport de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le régulateur des banques et des assurances, remis le 24 mai 2018 au Parlement, le stock des contrats de retraite supplémentaire non dénoués à compter des 62 ans des souscripteurs représente la bagatelle de 10,6 milliards d’euros. Certes, les Français ne sont pas obligés de liquider leurs droits à la retraite à 62 ans.
Une part tombée dans l’oubli
Une majorité d’entre eux décide de travailler plus longtemps car il leur manque des trimestres de cotisation et éviter ainsi de subir une minoration (« décote ») sur leur pension de vieillesse. D’autres disposent de tous leurs trimestres à 62 ans, mais souhaitent continuer à rester actifs pour bénéficier d’une majoration (« surcote ») sur leur future retraite. Enfin, certains n’ont pas envie ou ne sentent pas prêts à prendre leur retraite à l’âge légal.
Reste que, d’après le rapport de l’ACPR, le stock de contrats de retraite supplémentaire non réclamés s’élève encore à 5,4 milliards d’euros à 67 ans, l’âge d’annulation de la décote. Pour l’Autorité, une partie de ces contrats, qu’il lui est difficile d’évaluer, sont tout simplement tombés dans l’oubli. La faute en revient souvent aux assurés qui ne pensent pas à communiquer leur nouvelle adresse lorsqu’ils déménagent.
Courriers non distribués
Résultat : 50% des courriers envoyés par les gestionnaires (assureurs, mutuelles, institutions de prévoyance) aux 62 ans des bénéficiaires pour leur rappeler l’existence de leur contrat et la possibilité de les dénouer s’ils sont partis à la retraite n’atteignent pas leurs destinataires. Le pourcentage peut même atteindre 90% chez certains acteurs !
Le problème est particulièrement aigu pour les produits d’épargne retraite collective, comme les retraites supplémentaires à cotisations définies (plus communément appelées « article 83 » en référence au Code général des impôts qui les réglemente) et les retraites supplémentaires à prestations définies (ou « article 39 »). « Il apparaît clairement que, lorsque le lien entre le bénéficiaire du contrat et l’entreprise à l’origine du contrat, a été rompu ou s’est distendu, et que le bénéficiaire n’informe pas l’organisme d’assurance ou le gestionnaire d’un changement d’adresse, il devenait impossible de le retrouver », souligne le CCSF dans son avis.
Un tiers de confiance public
Un moyen pour ne pas perdre la trace des bénéficiaires serait d’indiquer dans les contrats de retraite supplémentaire le numéro de Sécurité sociale qui, lui, ne change jamais. Toutefois, cela poserait un problème de protection de données personnelles de confier à des entités commerciales une telle information, reconnait le CCSF.
D’où l’idée de cet organisme consultatif, qui rassemble des représentants des banques, des assureurs et des associations de défense de consommateurs, de passer par un tiers de confiance public. Pour le Comité, l’organisme le plus légitime à remplir ce rôle serait le groupement d’intérêt public (GIP) Union Retraite qui représente les 35 plus importants (sur 42) régimes français de retraite obligatoire.
Un décompte en ligne
Comme c’est déjà le cas pour les régimes de retraite obligatoire, les gestionnaires de contrats de retraite supplémentaire pourraient être tenus de transmettre leurs données au GIP Union Retraite. Ainsi, sur le modèle du relevé individuel de situation (RIS) qui recense les trimestres validés et les points de retraite cumulés, les assurés auraient accès à un décompte de leurs droits acquis en matière d’épargne retraite d’entreprise, mais aussi individuelle – plan d’épargne retraite populaire (Perp), contrat de retraite Madelin, contrat Préfon-Retraite ou encore complément de retraite mutualiste (Corem).
Actuellement, les Français reçoivent par courrier leur RIS à partir de 35 ans, puis tous les cinq ans jusqu’à leur départ à la retraite. Ils ont aussi la possibilité de le télécharger (e-RIS) à tout moment en se connectant sur info-retraite.fr, le site Internet du GIP Union Retraite. Le CCSF préconise la seconde solution pour le relevé de droits de retraite supplémentaire. Mais encore faut-il que la législation soit adaptée, sachant que le périmètre du GIP Union Retraite est aujourd’hui limité aux seuls régimes de retraite obligatoire. Les avis du Comité consultatif sont, par essence, indicatifs et non contraignants. À suivre.
Source : ccsfin.fr